UNE INGENIEUSE RENCONTRE 

Le 11 mars 2019, les étudiants en classe préparatoire ATS BIO Agro-Veto au lycée Besançon-Granvelle ont rencontré 8 professionnels intervenant dans des domaines aussi différents que solidaires, assurant des fonctions aussi variées que complémentaires, mais toutes impliquant de réelles responsabilités. Quel dénominateur commun ? Le diplôme d’Ingénieur agronome. 

 

Pourquoi cette table ronde ou presque ?

Nos étudiants préparent en général un double concours : ingénieur agronome et vétérinaire. Deux métiers sans lien apparent et pourtant, les déçus de véto se réjouissent en général a postériori de cette bifurcation. Et puis mieux vaut deux chances qu’une, sauf pour quelques exceptions, bille en tête s’il en est. L’admissibilité aux écrits n’est qu’une partie de gagnée ; et la bataille est de taille si l’on considère que les oraux représentent un coefficient supérieur aux écrits. En somme rien n’est acquis et donc, il ne faut rien lâcher avant l’arrivée. Aussi faut-il la préparer avec rigueur. L’une des trois épreuves d’admission consiste en une évaluation du projet professionnel, des motivations, de la personnalité, c’est-à-dire du profil du candidat. C’est un premier entretien d’embauche et celui-ci est déterminant car les notes peuvent s’envoler comme s’effondrer : de 4 à 20, oui c’est possible ! 

Si l’on peut apprendre à mieux parler de soi, en revanche il s’avère plus difficile de s’exprimer sur une idée vague. Et pour cause Ingénieur est un diplôme /concept prêt à travailler « tout en un » ; mais quel est ce tout ? 

 

Un tour de table éloquent 

 Pour l’identifier, citons ces invités qui nous ont offert généreusement de leur temps ( de gauche à droite ) : Manon Blandin, tout juste sortie d’Agrosup, en charge du pilotage de Natura 2000 et de la promotion de l’agriculture biologique à la DDT ; Mathieu Hauptmann, spécialisé dans les énergies renouvelables (process compostage, méthanisation plus particulièrement) chez Opale énergie, chef de projets nationaux et internationaux ; Christelle Clément, Responsable du BPREA au CFPPA de Chateaufarine et Maire de Gy ; Gilles Schellenberger, Directeur adjoint de la chambre d’agriculture Bourgogne /Franche-comté. Jean-Michel Vocoret, Rédacteur en chef de L’Eleveur laitier et Lauréat du grand prix du journalisme agricole ; Aude Perrez, Directrice de l’association Lin avec l’autre ; Victorien Courtois, Directeur de l’entreprise  Franc-Comtoise de Gestion Forestière ; Guillaume Duffet, Responsable commercial zone export à COOPEX Montbéliarde.

photo reunion ingenieur

Conseiller, manager, chef de projet, enseignant, journaliste, entrepreneur, chercheur, l’ingénieur agronome se situe entre la science et le monde agricole au sens lui-même très élargi puisqu’il recouvre les secteurs de la production animale et végétale, de l’environnement, de l’agroalimentaire et de la forêt. D’aucuns le qualifient de scientifique, d’autres lui confèrent un rôle plus technique ; en vérité son orientation et ses missions le définiront chemin faisant.

C’est la raison pour laquelle la majorité reconnaît qu’à la sortie de l’Ecole d’Ingénieurs, on dispose d’une boîte à outils assez généraliste en dépit d’une spécialisation en troisième année (parfois en deuxième année) et que c’est en forgeant qu’on devient forgeron ; de même on n’obtient pas toujours le poste convoité. Cela dit tous s’accordent sur l’importance de construire son parcours (et ce dès l’Ecole via ses stages), de rester aux aguets, d’oser les opportunités, d’être flexible et ouvert d’esprit, en bref de savoir s’adapter à son milieu tout en gardant un certain cap. Car si l’ingénieur c’est un peu « tout en un », ce n’est pas non plus « tout et n’importe quoi ».

 

Quelles sont ses missions et ses compétences escomptées ? 

Etre ingénieur, c’est diversifier ses missions, se spécialiser le cas échéant dans un domaine mais sans s’enfermer, l’approfondir sans le cloisonner. Plus précisément, l’ingénieur doit être capable de gérer, construire des projets, communiquer, autrement dit assurer un suivi administratif-technique-financier-humain, chercher des financements, s’informer et former, relier, déléguer en s’appuyant sur un réseau, appréhender la somme des réalités concrètes et les intégrer dans ses projets, collaborer avec plusieurs structures et partenaires, tant privés que publiques, tant politiques qu’économiques, tant nationaux qu’internationaux. Tout dépend, rien n’est strictement écrit. Les principes intangibles demeurent quant à eux la polyvalence et la rigueur, la communication, la curiosité et une approche synoptique, entre l’infiniment précis et court termiste et l’infiniment grand et lointain ; et cela devient plus vrai chaque jour, dans un monde qui se complexifie de manière exponentielle : « Qui est le patron ? », questionne l’un des participants. Eloge de la simplicité malgré tout, car l’ingénieur doit en effet simplifier sans réduire ni dénaturer pour prévoir et trouver des solutions, avancer coûte que coûte au cœur d’un monde dénommé en stratégie « VUCCA » (Volatile, Uncertain, Complex, Chaotic, Ambiguous). Sans être magicien, « l’ingénieur doit en permanence se challenger et c’est ça qui est intéressant », souligne Aude Perrez qui parle en connaissance de cause.

 

Portrait ….

 photo Aude P              

Le portrait de cette ancienne étudiante du lycée Granvelle vaut le détour : un BTS en productions animales et une année de classe préparatoire promotion 2013/2014 au lycée Granvelle , une admission refusée, un BTS Technico-commercial , une année comme technico-commerciale avant de repasser le concours et d’intégrer Agroparitech au titre d’Ingénieur apprentie chez Chays et Frères pendant trois ans, et depuis un an bientôt, Directrice d’une association qui a pour objectif de promouvoir une filière graine de lin régionale vertueuse pour tous, sans compter sa reprise de l’exploitation familiale ; à 26 ans, discrète et pour le moins efficace , bravo ! Saluons également à cette occasion la réussite de Guillaume Duffet et Victorien Courtois, deux autres de nos anciens étudiants.

A noter qu’un BTS ou un DUT avant une prépa ATS Bio et un cursus ingénieur représente un atout de poids ; à retenir également que le maillage des écoles d’ingénieurs agronomes se complète très bien, qu’il est possible de passer de l’une à l’autre, voire d’acquérir un double diplôme : pour exemple des écoles de Paris Tech telles que HEC et Agroparitech s’engagent dans cette voie.

Dans l’ensemble, chacun de nos invités a exercé plusieurs fonctions et/ou œuvré dans diverses structures et secteurs et/ou incarné plus d’un statut. De la discontinuité positive en continu : « On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve », affirmait Héraclite. Et le fleuve charrie actuellement les termes de changement climatique, d’agroécologie, de restructuration laitière, de diversification des marchés, de circuits courts, de valeur ajoutée, d’industrialisation de l’agriculture, d’énergies renouvelables, etc. Ingénieur exige d’être résolument en phase avec son temps.

Pour cette raison il va de soi qu’un ingénieur doit avancer avec optimisme dans le sens que lui attribuait Winston Churchill : « l’optimiste voit l’opportunité dans la difficulté », tandis que « le pessimiste voit la difficulté dans l’opportunité. »

Au nom de l’établissement, je peux affirmer que nous avons raison d’être optimistes, puisque nous avons obtenu depuis deux ans entre 60% et 65% de réussite au concours, à savoir pour cette année (2018-2019) un total de sept vétérinaires et huit ingénieurs, sachant que ces 7 vétérinaires ont obtenu également de facto un classement ingénieur. Nos étudiants se sont chargés de nous apprendre que nous avions obtenu un podium l’an passé, en d’autres termes la prépa du lycée Granvelle a été classée 3/12 des prépas ATS-Bio agro/véto. Pourvu que les fruits passent encore la promesse des fleurs ! 

Ainsi au nom de ces derniers et de l’établissement, je remercie nos invités pour leur contribution à cette réussite. 

                                                                      

Céline Clerget-Cohen

 

Professeure en CPGE ATS Biologie

Lycée Granvelle - Besançon -

Novembre 2019